Mélancolie
J’imagine que l’être humain a un penchant pour la
mélancolie. Un sérieux penchant. Il peut prétendre au bonheur parfait pendant un
moment, lorsqu’il est en société, qu’il pense à autre chose, qu’il n’a pas le
courage d’admettre ses failles en public, qu’il n’est pas de bon ton de se
plaindre, mais il ne peut pas se planquer éternellement. Et c’est seulement dès
lors qu’il est seul qu’il souhaite une épaule sur laquelle pleurer ses petits
malheurs, au détour d’un air de guitare. Comme il est faux! Et
pourtant, assumer ses faiblesses et ses plaies, c’est courir le risque de ne plus
voir qu’elles, sans rien faire pour les panser, d'infliger au monde qui nous entoure cette triste mine du miné pessimiste. Qu'y a-t-il de pire que cela?
Alors quoi ? Il faudrait qu’on ait le courage de prendre nos trois problèmes insignifiants à bras le corps ? Qu’on les résolve avec brio, efficacité et promptitude ? Qu’on ne les machouille pas quelques soirs pour le plaisir de se laisser aller à cette vague tristesse enivrante ? Qu'on soit simplement heureux, sans plus de question, satisfaits de ce qu'on a, c'est tellement plus que ce qu'ont la plupart des autres...
Regrets, solitude, incompréhension.
Sont-ils si mauvais compagnons?
Et, qu'on se le dise, qu'est-ce qu'on se ferait chier si tout allait bien!
Résoudre ses problèmes, combler les manques, et en voir apparaître de nouveaux, n'est-ce pas le fondement de nos existences? Le fruit de nos fiertés et de nos hontes. La ligne de nos objectifs. La voie de l'espoir. Bien lassé celui qui se voit comblé. Bien existant celui qui vie dans le besoin et l'attente.
Je manque donc je suis.
La vie est d'autant plus savoureuse qu'elle est semée de tristes embûches.
Et en tant qu'adoratrice de la vie... je vais arrêter là mes ternes élucubrations.